« …depuis la fondation du RIN jusqu’à l’opération référendaire du gouvernement issu du parti Québécois, la cause fondamentale du Québec indépendant a changé de sens. Et à un point tel, à travers les divers épisodes référendaires, que la légitimité même de la cause québécoise se trouve compromise. Mais de cela le parti Québécois, comme le gouvernement Lévesque, ne sont pas seuls responsables, même si on ne peut exonérer trop facilement ce dernier d’avoir développé des complexes qui n’allaient pas de soi et, qui ont tendu à desservir, sinon à trahir même la véritable cause québécoise. »

« La cause est québécoise parce qu’il s’agit d’un territoire ayant nom, le Québec, qui réclame son indépendance. Mais il reste qu’une des principales raisons de la confusion où nous sommes tombés vient de ce que la nouvelle génération des néo-nationalistes indépendantistes des années 1960 a voulu rompre avec l’histoire qui avait fait de nous, d’abord les seuls vrais Canadiens et fondateurs du Canada, à quoi s’était ajoutée la distinction de « Canadiens-Français », quand les Anglais vivant au Canada ont voulu se dire aussi des « Canadians ». Dans un sursaut de fierté anti-colonialiste mal dirigée, on a voulu mettre à l’index jusqu’au nom « Canadien », pour ne plus être que des « Québécois ». Cela a correspondu d’ailleurs avec un processus général de répudiation des valeurs que véhiculait notre histoire nationale, de construction d’un nouveau nationalisme proprement québécois qui n’aurait rien de commun avec l’ancien, dont on voulait totalement se dissocier. »

Les tenants du changement de nom 
« …n’ont pas assez tenu compte que l’expression « Québécois », elle, n’avait pas d’histoire et que tout le monde, ne la comprenant pas ou se refusant même à la comprendre comme eux, allait nous engager dans une lutte de signification de ce qu’est un Québécois. Tant que nous nous disions Canadiens-Français, personne d’autres que nous ne pouvait s’identifier à notre histoire, à nos droits, sans accepter de s’identifier à nous, tels tant de Canadiens-Français qui portent effectivement des noms anglais, irlandais ou écossais. »

« Dès que nous nous sommes dit Québécois s’est amorcée la prétention de beaucoup d’autres d’être Québécois autant que nous. Nous venions de leur offrir la chance de nous voler non seulement notre nom, mais notre pays même du Québec. Et notre gouvernement issu de la pensée indépendantiste a donné une sorte de sanction légale à ces prétentions en établissant le droit de vote au référendum de l’auto-détermination sur la citoyenneté canadienne et la résidence au Québec, et non pas sur l’appartenance nationale qui fonde ce droit. Le prétexte? Il lui fallait se comporter ainsi pour agir en bon démocrate et en esprit dépourvu de tout préjugé raciste. Le sort d’une nation, de notre nation, a été ainsi remis aux mains d’une proportion importante de Québécois qui n’en font pas partie. »

« Dans cette nouvelle perspective, le caractère français du Québec n’est plus qu’une question de majorité actuelle, non plus une question de droits nationaux fondamentaux, historiques, donnant droit de réclamer la latitude d’aménager le territoire en nation française de langue et de civilisation. La nouvelle situation présuppose que les autres groupes ne se distinguent de nous que par le nombre, et constituent des communautés aussi valides que la nôtre et dont nous devons, comme majorité, respecter les particularités en renonçant aux efforts d’intégration et d’assimilation, exactement comme nous avons fait; mais nous de plein droit dans l’intérieur du Canada comme minorité. »

F-A Angers caractérise ainsi l’arnaque référendaire :
Autrement dit :

 « la nation qui est à l’origine de toute cette action pour un Québec indépendant est en train de se laisser dessaisir de la propriété du Québec qu’elle réclamait en affirmant son droit à l’autodétermination. Elle admet la règle que la minorité « étrangère », coalisée avec une minorité des membres de la nation, puisse décider de l’avenir politique de celle-ci et de son orientation culturelle. Actuellement « française et pluraliste » dit-on, c’est-à-dire jusqu’à ce qu’une autre majorité s’estime justifiée de la déclarer autre selon l’état de majorité ou de minorité des groupes qui fondent le pluralisme. »

« Michel Brunet avait trouvé la vraie formule, celle qui a de la substance, quand il refusait de traduire les termes et distinguait au Canada deux nations: les « Canadiens » formant une nation sociologiquement bien caractérisée mais privée de son État, et les « Canadians », nouvelle nation en formation à l’intérieur du territoire enlevé à la France et tentant de nous éliminer par émigration, assimilation ou minorisation à l’état d’insignifiance par noyade dans un flot d’immigrants. C’était reconnaître le fait, qui ne pourra jamais être changé, que nous sommes et avons été les seuls Canadiens, on peut dire au moins jusqu’à la guerre de 1914. Même cette distinction sémantique que nous nous sommes laissé imposer, sur la différence de sens du mot « nation » en anglais et en français, est en bonne partie de la foutaise que nos trop grands soucis de bonne entente nous ont fait gaver pour nous faire accepter comme normal que les Anglo-Canadiens ne nous considèrent pas « as a nation ». Séraphin Marion montrait, dans Le Devoir du 9 ou 10 juillet 1980, que tous les auteurs anglais d’avant 1850 parlaient de nous comme étant « la nation canadienne ». 

Et je répète encore une fois que Lord Durham, dans sa formule célèbre parle de « two nations at war in the same State ». »

« L’addition du mot « français » à Canadien est devenue nécessaire parce que des Anglais ont voulu à un moment donné se considérer comme « Canadians » et que nous avons voulu bien préciser notre différence en cas de traduction. Canadiens-Anglais et Canadiens-Français expriment donc bien ce que nous sommes respectivement comme nations, et non les termes Québécois, Ontariens ou Albertains, etc. Et nous aurions dû garder, comme Benjamin Sulte, l’écriture « Canadien-Français », plutôt que le « Canadien français » imposé par l’autorité littéraire d’Olivar Asselin. La seconde ne distingue pas une nation canadienne-française, mais une nation canadienne comprenant comme qualificatif, et non comme substantif, des gens d’expression française. L’autre est le nom composé d’un peuple d’origine française qui a fondé le Canada et s’y est développé en formant une nouvelle nation. »

a- Les Canadiens-français des autres provinces 

« Il est bien évident que les Canadiens-Français des autres provinces continuent d’appartenir à la nation, comme restent Français tous les Français hors de France qui maintiennent leur attachement à leur patrie d’origine. Cela ne veut pas dire qu’en continuant de nous appeler Canadiens-Français nous étions obligés de faire participer à nos décisions du Québec ceux qui ont quitté celui-ci…»

b- La nation ethniciste 

« N’y a-t-il pas déjà au Québec tous les Harvey, les Murray, les Warren, les McNicoll, les Blackburn, les Fraser, les Allen, etc., pour régler ce débat. »

Pour le texte original complet :

http://numerique.banq.qc.ca/patrimoine/details/52327/3531775